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Subjectivement, Ana adorait la neige, un peu trop même. C'était tout blanc, tout beau, tout moelleux, ça tombait du ciel (Donc ça venait du pays de Ludo) et on pouvait faire joujou avec. La Gryffondor avait beau être en 7ème année, il suffisait qu'un minuscule flocon pointe le bout de son nez pour balayer toute la maturité qu'elle avait durement acquérit depuis son arrivée à Poudlard. Et puis, c'était aussi l'occasion idéale pour finir trempée et glacée jusqu'aux os : le prétexte parfait pour finir devant un bon feu de cheminée, une grosse tasse de chocolat chaud à la main, enveloppée dans un plaid tout doux aux couleurs de Noël dans les bras de Ludo.

Objectivement en revanche, l'hiver et le manteau blanc qui l'accompagnait étaient sa bête noire. Parce que la belle neige était en réalité une sacrée hypocrite. Elle faisait la belle, vous attirait vers elle en vous murmurant à l'oreille "Viens jouer avec moiiii" d'une voix délicate et d'un coup... PAAAAAF, c'était la fracture assurée. Parce que la belle neige, en plus d'être déjà glissante elle-même, cachait dans une grande fourberie son copain le verglas qui était bien moins douillet que sa camarade lors de la chute. Ou pire, si l'envie lui en prenait, il lui arrivait même de masquer un bon gros caillou pointu qui prenait un malin plaisir à vous rappeler que la nature reprend toujours ses droits.  

Heureusement, l'être humain était bien connu pour apprendre de ses erreurs. A croire qu'Ana n'était donc probablement pas humaine parce qu'elle avait beau connaître la ruse, elle se faisait avoir chaque année. Pire même, elle allait aux devants des ennuis avec une joie déroutante.

C'est ainsi qu'elle se retrouva au seuil de la porte d'entrée du grand hall, les yeux pétillants d'émerveillement devant l'étendue immaculée qui se trouvait sous ses yeux, reflétant les rayons timides du soleil en faisant naître des milliers de petits diamants scintillants, semblables à une myriade d'étoiles qui offraient leur spectacle à perte de vue.

Les arbres dépouillés étaient saupoudrés d'une fine couche blanche et Ana ne put s'empêcher de faire la comparaison avec du sucre glace dans son esprit, prenant toutefois la bonne résolution que cette année, non, elle ne finirait pas avec une grosse indigestion après avoir englouti volontairement des grosses poignées de neige.

Vérifiant bien que ses bottes étaient correctement nouées, son manteau bien attaché, son bonnet et son écharpe bien retroussés, elle s'avança prudemment sur le tapis blanc, tentant tant bien que mal de retenir l'excitation qui la dévorait de l'intérieur. Ne pas courir, ne pas trottiner, ne pas marcher trop vite, faire la limace en fait. C'était quelque part terriblement ennuyant mais la brune était bien trop émerveillée par le paysage qui s'offrait à sa vue qu'elle ne s'attarda pas sur son allure de progression digne d'un gastéropode asthmatique.

Un vent glacé balaya ses cheveux, commençant à teinter son nez d'une délicate couleur rouge qui lui donnait une allure d'alcoolo au milieu d'une beuverie. La froidure de la brise la fit tourner la tête en sens inverse pour échapper à la morsure de la fraîcheur sur ses joues, alignant parfaitement son regard sur un énorme stalactite qui avait trouvé naissance sur une branche un peu plus loin.

La tentation était donnée sur un plateau d'argent et Ana, toujours aussi raisonnable qu'elle était, se fit un grand plaisir d'y céder. Ce n'était pas de sa faute aussi, si cette chose ressemblait à une énorme glace digne de sa Russie natale ! Elle s'approcha précautionneusement du précieux, se délectant au passage du craquement de la neige sous ses pieds qui sonnait comme une douce mélodie dans ses oreilles. Elle inspecta sa trouvaille sous toutes ses coutures, pesant le pour et le contre jusqu'à trancher que oui, ce truc ressemblait vachement à un Mister Freeze naturel.

Même si sa physionomie ne s'y prêtait pas, Ana avait toujours été gourmande et c'est donc avec un entrain non-dissimulé qu'elle inspecta brièvement les alentours avant d'aller fourrer sa langue sur l'objet du délit.

Déception, c'était le mot. Aucun goût, à part peut-être un vieil arôme de terre boueuse mêlée à de l'humus en décomposition. Beurk.

Froncement de sourcil. Début de panique. Perte de sang-froid.

Est-ce qu'elle était encore en train de rêver ou sa langue était vraiment restée collée à ce machin ?! Elle essaya d'abord doucement de décoller sa langue puis commença à perdre patience, se mettant carrément à insulter le stalactite de manière très sérieuse.

"..ais ...âche-..oi chal conthre-fachhhhon ..ê..e ..as bonne." (Mais lâche-moi sale contre-façon même pas bonne) commença-t-elle à gémir.

"y'te ..éviens y'vais a..eler ..udo, ça va ma.. se terminer ..our toi !'' (J'te préviens j'vais appeler Ludo, ça va mal se terminer pour toi!) ajouta-t-elle comme si le fait de menacer un morceau de glace pouvait changer quelque chose à la situation. Minute, Ludo, olalala, mayday mayday. Comment est-ce qu'elle allait lui expliquer ce qui était arrivé à sa langue parce qu'il le remarquerait pour sûr leur de leur prochaine rencontre.

Ana souffla, tentant de se calmer. Pour ça, il fallait de toute façon d'abord qu'elle arrive à sortir de là. Surtout qu'avec le temps qu'il faisait, le stalactite n'était pas prêt de fondre pour la libérer... Mais quelle idée d'avoir été léché un truc pareil ! Pan sort de ce corps tout de suite

Souffle n°2. Puis n°3. 1,2,3... SOLEIL ! ILLUMINATION !

Dégainant sa baguette, non sans galérer un tout petit peu avant à cause de ses moufles, elle lâcha un "..umus so..em" (Lumus Solem) - bien heureuse de maîtriser un tant soit peu la magie informulée parce qu'elle était à peu près certaine que la formule seule n'aurait pas suffit - qui fit jaillir un rayon de lumière à travers la glace qui disparut dans un filet d'eau. Pffiou, voilà au moins une bonne chose de faite. Enfin si l'on omettait le fait qu'elle avait la langue brûlée par le froid et qu'elle aurait l'air super maline si elle allait à l'infirmerie et encore plus si elle n'y allait pas et qu'elle devait raconter sa bêtise à Ludo. Dilemme cornélien comme dirait les moldus !

Au moins, elle pourrait enfin se vanter de ne pas être tombée, c'était déjà ça.

Enfin du moins, elle aurait pu s'en vanter. Elle aurait pu s'en vanter si elle avait fait demi-tour moins brusquement , si elle n'avait pas été aussi vexée de s'être fait avoir par un petit bout d'eau congelée, si la neige n'avait pas réitérée sa mauvaise blague de cacher un caillou tout pile au mauvais endroit.

La russe bascula dans un soupir, "C'est reparti pour un tour" pensa-t-elle en levant les yeux en l'air, sans même penser à la douleur de son derrière anesthésié par le froid. L'idée de lutter ne lui traversa même pas l'esprit, elle savait très bien qu'en bonne catastrophe qu'elle était, elle ne ferait qu'empirer les choses. Alors elle croisa les bras devant sa tête, parce qu'elle n'avait pas très envie de mourir non plus, et se laissa porter par la glace. N'empêche qu'elle allait vachement loin même sans luge, elle devrait sérieusement penser à faire carrière dans les compétitions olympiques moldues.

Ca devenait long tout de même cette histoire, Ana commençait à se demander sérieusement quand est-ce qu'elle allait s'arrêter. C'est vrai que le sol dénivelé n'aidait pas mais quand même, faire autant de chemin sans croiser le moindre obstacle potentiellement dangereux, ce n'était pas digne de la grande catastrophe ambulante Ana ! Ecartant une de ses mains, elle s'autorisa à jeter un coup d'oeil à sa trajectoire, à peu près une demi-seconde avant d'heurter le dit-obstacle qui se trouvait malheureusement ou heureusement être un élève.

Woops, grosse boulette. D'autant plus que l'élan qu'elle avait gagné dans sa descente la fit entraîner le jeune homme avec elle dans sa dégringolade interminable. C'est fou ce que c'était balaise la gravité couplée au verglas n'empêche !

La glissade s'éternisa encore un moment avant que le sol devienne enfin plus plat, faisant terminer leur course effrénée tout droit sur le lac gelé. Heureusement, la glace était déjà bien prise, créant une barrière tenace entre leurs deux corps échoués et l'eau glacée qui se trouvait là dessous.

Ana reprit son souffle, s'éparpillant rapidement en admirant la brume que sa respiration créait dans l'air avant de se rappeler qu'elle avait accessoirement brutalisé, sans le faire exprès, quelqu'un. Son regard se tourna alors vers sa victime, une victime qui n'avait d'ailleurs pas des allures de victime de l'avis d'Ana mais une victime innocente quand même.

Elle se leva alors pour essayer de se rattraper et s'excuser en bonne et due forme auprès du garçon qu'elle ne connaissait pas avant de se rappeler dans un "CRAC" sec - résultant d'une nouvelle chute - qu'ils avaient accessoirement atteri sur le lac gelé. C'était certain maintenant, elle allait mourir ici. Ana n'avait jamais réussi à faire un seul pas sur la glace en restant debout, que ce soit avec des patins ou pas. Et elle savait d'expérience qu'essayer de ramper sur la glace la faisait plus reculer qu'autre chose.

Bon et bien quitte à mourir, elle voulait au moins mourir en paix avec sa conscience parce qu'elle était vraiment navrée d'avoir entraîné le garçon avec elle dans sa future tombe. Qui que ce soit, il ne méritait pas d'avoir hérité injustement de la boulette russe. (Boulette russe, roulette russe, you understand)

"Je suis vraiment dézolée, z'ai glissé et..." commença-t-elle à s'excuser avant de porter vivement la main devant sa bouche, rougissant au possible. Mince, sa langue, elle l'avait oublié celle-là ! Et voilà qu'elle allait en plus vivre ses derniers instants en zozotant, c'était du propre.

N'empêche qu'une russe au nez pivoine qui zozotait, ça devait être un sacré spectacle.

HRP:

Tenue qui va pas mais tant pis:

« On reste calme, » « Tant qu’on ne fera pas de mouvement brusque, on ne craint rien. »

"Compris mon général." pensa Anastasia. Général, capitaine ou peut-être lieutenant ?  Une chose est sûre, le jeune homme en face de lui avait l'air tout droit sorti d'une affiche de recrutement de l'armée moldue dans laquelle le regard d'Ana s'était perdu lors d'un des cours de Mr Davis. C'est qu'ils avaient de la gueule les militaires moldus n'empêche ! Un charisme indéniable à vous faire tomber par terre, peut-être que Ludo avait été soldat dans une autre vie ? Elle divaguait.

Ne pas faire de mouvement brusque ? Easy. Ou pas pour une personne comme Ana.

Concentration. Concentration. Wait. Respirer ça n'a rien d'un mouvement brusque, pas vrai ? Alors pourquoi était-elle en train de se faire un petit concours d'apnée ? Comme si c'était le moment de prouver au Serdaigle monde qu'elle était digne d'entrer dans le livre des records. Record du monde de la bêtise oui ! Ou peut-être de la gaucherie ? Probablement les deux.

Toussotant légèrement pour reprendre son souffle, après son Ô combien brillant record de 8 secondes et demi d'apnée (elle irait réclamer son trophée plus tard pour sûr), la Gryffondor tenta de reprendre contenance. Bercé par la faible lueur de l'aube naissante, le visage du Serdaigle lui était apparu plus distinctement. Et elle voyait déjà Goldie lui rappeler ce malheureux contre-temps jusque dans sa tombe, lui chuchoter des "Anaztazia Ztonehenze" pendant son sommeil et autres petites taquineries dont seule l'aînée des Andrews avait le secret.

«  Tu te sentirais d’accioter des balais volants depuis aussi loin que le stade de Quidditch pour nous sortir de là ? Tu as bien ta baguette, n’est-ce pas ? »

Une seule proposition entraînant deux problèmes. Dash 2en1, comme dirait la lessive.

Premièrement, la seule évocation des balais volants avait fait frémir le corps d'Ana tout entier. Voler, c'était une action incompatible avec le fait d'être une calamité intergalactique, d'autant plus quand cette même calamité avait le vertige. Calamité+Panique, en voilà un duo parfait pour se balader sur un balai par ce temps. Ana commençait sérieusement à se demander si la professeur de Divination présageait sa mort à pratiquement tous ses cours parce que c'était la tradition de prof' de divination ou parce qu'elle allait réellement rejoindre l'autre côté avant d'avoir pu admirer la tête de ses parents lorsqu'elle leur annoncerait sa liaison avec Ludo. Non, elle ne pouvait décidément pas rater ça.

Deuxièmement, elle devait réussir à atteindre sa baguette qui se trouvait à peu près actuellement enfouie sous son gros manteau, son pull, son sous-pull, son tee-shirt et son débardeur. Sans compter les moufles qui représentaient un élément perturbateur non-négligeable quand on avait déjà du mal à se servir de ses mains quand elles étaient libres.

Ana devait au moins tenter de l'attraper, elle devait bien ça à Tobias, il n'avait rien demandé le pauvre. Et peut-être qu'elle pourrait négocier pour son silence. La brune s'arma donc de toute l'adresse inexistante dont elle était capable et partit à la recherche du trésor perdu. Elle sentit l'extrémité de la baguette à travers ses moufles, elle y était presque, ne restait plus qu'à saisir le petit bout de bois... qui n'avait apparemment pas très envie de sortir de son petit foyer douillet et glissa.. plus bas. Ana écarquilla grand les yeux en sentant sa baguette frôler sa cuisse, quelle gourgandine celle-là, pour qui elle se prenait ! C'était réservé à Ludo cet endroit-là.

« Non, enfin oui. Ze veux dire, peut-être mais... »

Ne pas savoir mentir quand on était petit, c'était plutôt positif. Les gens avaient eu tendance à dire à l'époque "Qu'elle est mignonne la petite Stonehenge, qu'elle est bien éduquée!". Ne pas savoir mentir à son âge, par contre, lui attirait bien plus d'ennuis et de moqueries qu'elle ne voulait bien l'admettre. La mignonne petite Stonehenge était plutôt devenue "la fille niaise et naïve, aussi futée que ses doigts de pieds " (parce qu'on s'entend que pour se prendre des coins de meubles à tout va, les orteils c'est pas franchement malin).

Foutu pour foutu.

« Euhhh... Za te déranze pas de regarder ailleurs deux minutes ? » demanda-t-elle, décédant intérieurement par toutes les insinuations qu'il y avait dans sa requête. Il ne fallait pas être né de la dernière pluie pour comprendre le problème, d'autant plus quand on était un Serdaigle et encore plus quand on était Tobias le Serdaigle. « Ziteplaît? » ajouta-t-elle faiblement, ses dernières parcelles de dignité bloquant ses cordes vocales.