Ca y était, Pan avait attrapé une maladie orpheline, le monde ne se concentrait plus qu'en une seule couleur : rose au plafond, rose sur les murs, rose sur les roses, rose sur sa peau..

Il fallut quelques temps à Pan pour comprendre que la couleur rose résidait en fait dans l'apparence du Larkspur Tea Room et non dans ses rétines. Assise à une table particulièrement bien décorée de fleurs et autres décorations fanfaronnes qui rappelaient à la blondinette certaines de ses robes les plus féminines, la jolie fille attendait que son thé refroidisse.

Elle venait de se brûler plusieurs fois déjà, et ses pauvres petits doigts fraîchement pansés ne méritaient pas plus de sacrifices de sa part. Et si Pan avait déjà eu le temps d'incendier maintes et maintes fois ses doigts, c'était parce qu'elle attendait avec impatience nounours aka Tobias Armstrong, l'ami fidèle mais compatissant, l'épaule sur laquelle piquer un somme, une des personnes avec qui elle pourrait passer sa vie - à boire du thé et à parler comme ils le faisaient toujours et depuis un moment déjà.

Et quoi de mieux pour déguster un thé avec nounours que le Larkspur Tea Room ? C'était un endroit mignon tout plein, comme lui, alors il ne devait sûrement pas avoir de problème à aller faire un tour là-bas. Un grand sourire excité aux lèvres comme à chaque fois qu'elle allait revoir nounours pour jouer à la dinette, Pan jouait avec sa cuillère. Splosh sur le voisin de table, splash sur le garçon avec la langue un peu trop sortie de la bouche de sa coupine. Tout le monde méritait bien de goûter son thé !

Un regard amusé de Rosie qui se voulait probablement un peu plus réprimandeur et la demi-vélane se contenta de jouer avec ses mèche de cheveux. Elle en posait une en équilibre sur sa lèvre supérieure, juste en dessous de son nez et louchait pour la regarder. Et lorsqu'elle retombait, elle recommençait. L'une tenait particulièrement bien lorsque les autres se prélassaient paresseusement dans son thé !

Nounours finirait bien par arriver, il ne pourrait pas se passer d'elle aussi longtemps quand même. Car nounours sans Pan c'était comme Pré-au-lard sans le Larkspur Tea Room : le monde aurait difficilement pu s'en passer !

Enfin, nounours arriva. Plus maigre que jamais, priant intérieurement pour que sa Pan remplume le tout - il n'avait même pas besoin de le dire, elle le voyait bien ! - feignant de ne prendre qu'un maigre thé alors qu'il savait très bien toute la nourriture qu'il allait ingurgité deux minutes plus tard. La blondinette le gratifia d'une accolade et d'un bisou sur la joue avant de reprendre à son tour la carte histoire de commander quelques pâtisseries qui combleraient bien l'appétit si peu rassasié du bleu.

« Tu sais bien que je t'attends pour commander à manger, nounours » répliqua gentiment la cinquième année en gratifiant son tea-partner (thé en retard !) d'un grand sourire.

Faisant revenir la serveuse, Pan demanda à ce qu'elle lui apporte ses meilleures recettes. Ensuite devant ses yeux, les pâtisseries la faisaient saliver d'avance. Pan mangea la moitié d'un éclair et enfourna sans pression le reste dans la bouche de son ami. Elle but une gorgée du thé qui avait refroidit depuis le temps, puis reporta son attention sur le septième année.

« Mais non voyons tu connais déjà ma recette de crêpes préférée, petit nounours.. » Pan lui expliqua sagement le début de la recette, en oubliant presque qu'il devait déjà la savoir par coeur depuis le temps. « Tiens, en parlant de Nana, c'est elle et moi qui avons repeint la salle commune des Serpy-llières, mais chhht, c'est un secret, ne le dis à personne. »

Alors, les yeux pétillants, Pan lui expliqua comment elle avait eu le mot de passe d'un vert un peu trop confiant, comment Nana et elle-même avaient pénétré secrètement chez eux pour te repeindre en rouge - tellement de professionnalisme que les deux rouges s'étaient réellement retrouvées ROUGES ! - sans oublier bien sûr leurs slogans dignes de la plus belle pub de vache Kiri du monde.

La blondinette partagea quelques autres gâteaux avec le brun avant de reprendre, la bouche pleine et la tête vide. Sans pourtant parler à voix basse comme chaque vandale PAN-dale se devait de le faire, Pan finit son explication avant de se tourner violemment vers son ami, se souvenant d'un sujet de conversation qui se devait d'être exploité en moins de deux minutes voire sur-le-champ.

« C'est pour ça que je pense que les Serpentins n'aiment pas les bonbons à la menthe, tu compre.. OH NOUNOURS J'AI FAILLI OUBLIER. Il m'est arrivée quelque chose de très bizarre récemment. »

La lionne s'accrocha au bras du bleu comme si elle s'apprêtait à lui raconter une histoire qui faisait peur. Sa tête posée sur lui comme elle aimait le faire, Pan attendit que sa respiration reprenne un rythme normal et, regardant son ami dans les yeux, commença son récit.

« J'étais au Chaudron Baveur, je croupissais tranquillement sur le sol - non les questions c'est à la fin - et alors que je n'arrivais pas à convaincre Tom de me resservir - mais qu'est-ce que je pouvais faire d'autre, tous les verres venaient de me tomber dessus - il m'a aidée à me relever. Il, James, pas Tom. Tu comprends, au début j'étais un peu énervée car je voulais boire, moi. Mais dès que j'ai vu son visage - bon j'avais envie de vomir mais j'avais beaucoup bu - j'ai tout de suite vu celui de l'amour. On s'est allongés sur une table et on a dormi. L'ennui c'est qu'au réveil je me souvenais plus de tout mais j'étais sûre que son visage était plus celui d'un blob fish que celui de l'amour. Je veux dire, je ne l'aime pas et je suis sûre qu'il préférerait embrasser une lamproie des mers que de rester deux secondes en ma compagnie.. Ca m'embête, parce qu'à chaque fois que je bois et qu'il est dans les parages, je lui tombe dans les bras.. Tu me connais, je suis maladroite comme fille. »

Peut-être que Pan allait finir par penser à arrêter de boire, on ne savait jamais !